Je pense que nombre d'entre vous me connaissent
(ou peuvent le faire (
www.guitares-donadey.com) excusez mais mon siteweb est bien dépassé, mais je n'ai pas le temps de m'y remettre .... !)
D'abord soyons clairs :
à quoi sert un CAP ou tout autre diplôme pour faire ce métier ? vu qu'il n'y a pratiquement pas d'embauche ? si ce n'est tenter par ce moyen détourné de rentrer dans des cases qui ne sont pas faites pour nous afin d'y trouver un semblant de financement ?
C'est un métier où vous serez toujours dans la démerde individuelle alors autant commencer tout de suite non ?
Moi ?
J'ai eu un travail à mi-temps pendant 7 ans afin de pouvoir me former le reste du temps ... et il n'y avait à l'époque pas de Google pour tout savoir, je ne savais même pas où acheter des outils ! de la gomme laque etc etc ...
Je copie-colle une lettre type que j'ai fini par écrire … vu le nombre de demandes que j'ai, afin de bien expliquer les choses :
Le CAP comme toute formation, c'est une bonne chose pour les jeunes et ceux moins jeunes qui désirent apprendre un métier... certes !
Nous artisans, désirons également transmettre le métier que la vie nous a appris, où on a souvent dû se débrouiller tout seul … il arrive un moment où la "passation" est une chose à considérer pour donner à ses efforts une continuité.
Jusque là on est d'accords !
Toutefois, Un métier d'Art ne s'apprend pas comme un autre :
Un simple exemple :
Si j'étais dans le BTP ou simple maçon, je pourrais à la fois avoir plaisir de transmettre et intérêt financier à prendre des apprentis,
le système des aides d'État actuelles y sont parfaitement adaptées.
imaginons :
Je prends 3 apprentis et avec eux je construit une villa, je transmet mon savoir sur place, mes combines, mon tour de main, et en même temps ils font un réel travail de maçonnerie, remplissent la bétonnière, poussent les brouettes, portent les éléments … ce n'est pas le travail qui manque sur un chantier, il n'est même pas besoin d' avoir un atelier coûteux.
De plus j'ai le droit de ne les payer que 50% du smic, selon l'âge, je ne paye pas de charges sociales pour eux …et j'ai une prime de compensation : ça baigne ! Et, cerise sur le gâteau :
Je suis également payé par mon client pour lui faire cette villa (les apprentis m'y ont aidé … sans que cela ne me coûte grand chose) que demander de plus ?
PAr contre, pour apprendre un métier d'Art il vous faut un enseignant qui s'occupe de vous à temps plein, il vous fait un programme, et vous ne pouvez l'aider en RIEN … même pas dans 3 ans, pour ce qui me concerne, vu le type de production que je réalise.
Pour former un apprenti, Je devrais lui fournir mon atelier équipé, un établi, il devrait s'acheter des outils à lui et m'occuper de lui à 100% .
Bref, c'est un travail d'enseignant à temps plein et qui fournit, qui plus est, toute la structure.
Les aides actuelles d'apprentissage ne suffisent même pas à rémunérer plus de 30 h sur une année, bien que nombre de luthiers acceptent quand même cela à cause de leurs faible activité de vente.
L'apprenti n'aura fait aucun travail productif pour moi en apprenant mon métier. Quant à parier s'il restera des années chez moi ensuite pour "payer" cette formation par son travail … de nos jours, c'est rare.
On voit de plus en plus fleurir des centres de formation et l’État donne des aides pour cela.
Dans ces centres, qui absorbent les aides de l’État, Les administrateurs et professeurs pour les matières théoriques sont payés, mais la structure centrale de l'apprentissage technique doit être assurée par un artisan, dans les locaux de l'artisan et ceci sans rémunération réelle … si ce n'est une faible "compensation" ... l'élève se retrouve alors en "stage" dans un magasin de musique à faire quelques réparations et réglages (qui nous enlèvent une part de notre travail pour un résultat souvent médiocre)..et il n'apprend pas grand chose ainsi !
Cela ne cadre pas avec ce que DOIT être un métier d'Art !
Si je veux enseigner ou plutôt transmettre, je pense normal d'être payé pour cela de la même façon que le prof de Français l'est. je veux bien m'engager dans la transmission de mon savoir comme on dit, mais dans la mesure où l'élève ne participe en rien à la production, où l’État paye l'administration et les professeurs de ces centres, il est nécessaire de rétribuer le principal acteur dans ce cas : l'artisan !
Former quelqu'un chez soi, sans contrepartie de production possible, représente un coût et investissement important. Ce qui n'est pas le cas du maçon pour qui tout est bénéf…
De plus, être payé 10 € / l'heure, s'il faut l'intégrer dans son chiffre d'affaire, c'est 70 % qui partent en charges diverses. Il ne reste pas grand chose.
il y a donc là "LE" problème … de mon métier et de sa transmission, car passer son savoir, ses acquis, c'est à faire absolument, c'est une richesse de vie … certes. Mais il est nécessaire d'être rémunéré pour les heures d'enseignement.
Il existe en Belgique par exemple, le
cmb, où des luthiers (que je connais bien) sont embauchés comme profs.
Il y a certains Luthiers qui se sont fait "formateurs indépendants" certes, et se font payer entre 10 et 15 € de l'heure…
Dispensent ils une formation validante (CAP, BMA) ?
Ou bien sont ils en rapport avec des aides du conseil régional ?
Je ne sais pas et dans ce cas, les élèves n'obtiennent pas toujours des financements.
Pour faire une formation validante ACTUELLEMENT il faut créer une structure de formation agréée par des normes Européennes qui sont devenues drastiques …
Alors, les structures de formations ne possèdent souvent même pas d'atelier, ce qui simplifie pour elles le respect des normes, elles encadrent les cours théoriques, et envoient l'élève, qui signe une décharge, en apprentissage chez l'Artisan qui n'a qu'un défraiement symbolique.
Il faudrait pouvoir retourner au systèmes de bourse des métiers d'Arts (SEMA) où l'élève pouvait avoir 2 fois 900 h et avoir un minimum salarial, et l'artisan être rémunéré normalement. à cette époque, les 2 parties faisaient un dossier ensemble sur la formation et le présentaient à la SEMA.
Il y a dans ma ville (Marseille) une superbe structure d'enseignement des métiers du bois (Lycée Poinso Chapuis) où ils enseignent sculpture, marqueterie, ébénisterie et vieux gréements … en CAP BMA et Bac pro
Elle dépend de l'éducation nationale …
Il y a des professeurs agréés …
J'ai proposé d'y ouvrir une section Lutherie mais il semble qu'une Luthier comme moi n'y ait pas accès … mon âge, proche de celui de "leurs" retraites leur parait inadapté (!!!) et mes presque 40 années de pratique ne semble pas suffire à l'Administration !
J'ai même proposé d'organiser une "spécialité Lutherie" au sein des CAP/BMA comme une "option" des autres disciplines, … réponse négative de l'administration qui dit que la Lutherie n'est pas un marché porteur … (comme si les autres disciplines avaient un marché porteur !!!)
Pourtant le lycée Poinso Chapuis a son Atelier de Sculpture libre 2 jours par semaine et pourrait alors le "rentabiliser"….le prof de sculpture y étant tout à fait disposé !
J'ai contacté le GRETA … j'ai passé presque un mois à préparer des projets et le GRETA n'a pas de financements pour débuter cela.
Bref … en France, à part faire une formation individuelle privée et auto-financée il y a peu de solutions simples.
Avant, on pouvait aller demander son N° de formateur directement au bureau des direction régionales du travail … maintenant c'est par internet et c'est difficile d'avoir qqn qui renseigne sur la façon de monter un dossier. De plus si mon atelier n'est pas "aux normes" ce sera un obstacle.
Je n'ai pas de mon côté pris le temps de faire les investigations nécessaires et n'en ai pas trop envie si c'est pour y perdre des jours de travail !
Voilà mon avis sur la question.
Mais je reste disponible pour vos idées et suggestions.
Md